Pour un jeune né dans l’Indre ou dans le Cher, la base militaire de la Martinerie, près de Châteauroux, a longtemps été un endroit qui inspirait plus la crainte que la sympathie. Loin du centre-ville et de la gare, sinistre, comme la plupart des casernes, la Martinerie n’était pas spécialement un lieu où on avait envie de passer un an de sa vie sous l’uniforme.
Puis le temps s’est écoulé, le service national a été suspendu par le président Chirac, et ce camp militaire a perdu cette activité qu’on lui connaissait quand on circulait sur la route qui le traverse. Compagnies au garde-à-vous, camions bâchés de kaki, véhicules école, plantons frigorifiés ont peu à peu disparu du paysage. Cette base fantôme a commencé à évoquer un de ces lieux morts qu’affectionnent les photographes et les amateurs de films apocalyptiques, les herbes folles envahissant les allées qui avaient été damées si souvent par les semelles à crampons.
Cette prolifération végétale est aujourd’hui partiellement mise à mal par un petit bataillon de bêtes noires, dont au moins deux ânes (ou ânesses?) de notre race régionale et plusieurs bovins de la même couleur, sans que je puisse identifier de quelle vaches il s’agit.
Les animaux divaguent dans un grand espace, fermé par la clôture du camp et complété par un fil électrique. On voit qu’ils sont en excellent état, et qu’on a pris le soin de mettre à leur disposition des stalles contre le mauvais temps. Cette initiative, originale et audacieuse, mérite d’être saluée.
Il existe des terrains militaires désaffectés dans toutes les régions françaises, et plusieurs d’entre elles sont le berceau de races asines. L’exemple de la Martinerie pourrait donner des idées bénéfiques à certains commandants chargés de la gestion de ces espaces.
Conclusion surprenante: l’âne a peut-être sa place dans l’armée!